En bref : juillet 2021

Voilà un été qui ne ressemble pas à l’été mais plutôt à un mois de septembre un peu triste. Sorties, plein air et campings sont tombés à l’eau. Pour garder le moral ? Lire et oublier la météo.

Quelques suggestions de lecture pour passer le temps en attendant le soleil : Waiting for the Sun, comme on dit chez les Doors.


Rien à perdre de Roberto Montaña

Roberto Montaña est un auteur uruguayen qui dirige des ateliers d’écriture et de théâtre et écrit des nouvelles. Rien à perdre est son premier roman traduit en français.

Une découverte ! Un road-trip complètement déjanté avec trois copains. Ce qui aurait pu être un voyage génial – il faut dire que tous les trois auraient bien besoin de vacances : l’un pour s’affranchir de sa mère, l’autre pour oublier sa calvitie et ses kilos en trop indigne de son passé de rock star, et le dernier pour faire face à l’infidélité de sa femme – se transforme rapidement en grosse galère puis en équipée sauvage. Attention : les trois hommes sont tous quinquagénaires, à peu près totalement incompétents sur tous les tableaux, se vannent sans cesse, ont le chic pour se fourrer dans toutes sortes d’ennuis surtout quand il s’agit de passer la frontière et ont pourtant le coeur sur la main. La preuve : les voilà qui prennent en stop une jeune femme enceinte ! Une décision lourde de conséquences…

C’est hilarant, les dialogues font penser à ceux de Pulp Fiction, absurdes et pas si fous que ça. Le roman glisse vers le noir, à grands coups de volant et de disputes… Magnifique et réjouissant !

Malhonnêtes ? Ma foi il y aurait bien un peu de ça. Maladroits ? Totalement ! Mal élevés ? Faut voir, ça dépend de ce qu’on entend par « élevé ».

Rien à perdre de Roberto Montaña, Editions Métailié
Traduit de l’espagnol (Uruguay) par René Solis, 160 pages, juin 2021


Olinka d’Antonio Ortuño

Antonio Ortuño est un écrivain mexicain qui a publié plusieurs romans et contes et a figuré en 2010 dans la liste britannique Granta des meilleurs écrivains hispanophones en même temps que l’édition mexicaine GQ le désigne comme auteur de l’année. Chez Bourgois, on trouve deux de ses romans : La File indienne (2016) et Méjico (2018).

Olinka, c’est ainsi que se nomme un ensemble de maisons luxueuses et sécurisées, implantées à Guadalajara sur un terrain obtenu par violence et escroquerie. La fraude fiscale ayant été repérée – entraînant bien davantage de sanctions que l’expropriation forcée, violente et sanglante des pauvres gens qui vivaient là – : il faut un coupable. Et ce n’est pas le patriarche de la famille Flores, Carlos, qui va se dévouer mais bien son gendre, Aurelio Blanco.

On lui avait promis de prendre bien soin de lui et de ne lui faire faire que quelques années de taule, mais il en a pris pour quinze ans, sans aide, sans fric, sans visite. Sa femme, la fille de Carlos, et sa fille se sont éloignées de lui, et il est même divorcé, sans l’avoir voulu car, par une fidélité têtue à la famille Flores, il a passé quinze ans à espérer retrouver sa famille et ses biens. Justement, il est libéré quelques semaines avant l’heure, juste à temps pour Noël, et il compte bien retrouver les siens, ou ceux qui étaient les siens et pour lesquels il a sacrifié quinze années de sa vie.

Bien sûr, les retrouvailles manquent de chaleur et Aurelio comprend que sa femme l’a remplacé et que sa fille ne veut rien avoir à faire avec lui. Il n’avait pas pensé que la petite fille dont il s’occupait avec tant de bonheur puisse maintenant ne même plus supporter d’être en sa présence. Tant d’ingratitude est pire pour lui que ces années d’incarcération. Tout l’étonne d’ailleurs, le monde a tellement changé, les rapports entre les gens sont plus violents qu’auparavant, la ville ne ressemble absolument plus à celle qu’il a laissée, tous ont la tête baissée sur leur smartphone et les espaces verts se sont raréfiés pour céder la place à une ville où les classes sociales sont plus marquées que jamais, jouet des appétits des escrocs qui mangent la ville et n’en laissent que des rogatons. Olinka n’a jamais décollé, les propriétés se sont mal et peu vendues, rien n’a marché comme prévu : c’est un endroit laid et presque désert, un échec total.
Petit à petit, Aurelio prend conscience de ce qui lui est arrivé, de ce qui s’est vraiment joué à Olinka et du rôle réel de son beau-père.

Un beau roman, cruel, noirissime, et un personnage attachant, Aurelio, père et mari aimant, pris au piège d’un honneur maintenant désuet qui n’engage que lui. Mon coup de coeur !

Olinka d’Antonio Ortuño, Editions Bourgois
Traduit de l’espagnol (Mexique) par Margot Nguyen Béraud, 260 pages, avril 2021


Les chroniques de Fogas, Tome 1,L’Auberge de Julia Chapman

Julia Chapman, on la connaît pour sa série Les Détectives du Yorkshire. La voici qui entame une nouvelle série, cette fois-ci située dans les Pyrénées.

Deux Anglais ont racheté l’Auberge des deux Vallées et c’est loin de plaire à tout le monde ! « Boutons les Anglois hors de chez nous ! », s’écrient les plus chauvins des habitants de la petite commune de Fogas, dont le maire… Paul et Lorna sauront-ils s’asseoir à la table des négociations franco-britanniques ?

Comme toujours, charmant, malicieux et drôle, épinglant gentiment les uns et les autres…

Les chroniques de Fogas, Tome 1,L’Auberge de Julia Chapman, Editions Robert Laffont
Traduit de l’anglais par Dominique Haas et Stéphanie Leigniel, 312 pages, juillet 2021


L’Espion français de Cédric Bannel

On connaît de Cédric Bannel L’Homme de Kaboul, Baad ( Prix du meilleur polar des lecteurs de Points 2017) et Kaboul Express. Ses romans décrivent avec réalisme et minutie la PJ de Kaboul et la DGSE ; espionnage et renseignement n’ont pas de secrets pour lui.

Edgar exerce un métier dont il ne parle guère mais dont il est fier : il tue les ennemis de la France pour le compte de la DGSE. Et cette fois-ci, la cible est une femme surnommée La Veuve blanche, une aristocrate française qui dirigerait un réseau terroriste depuis l’Afghanistan. Mystérieuse et insaisissable, Edgar a un adversaire de taille et il va devoir se faire aider du commissaire Kandar, compagnon de Massoud. Alliés contre la menace terroriste, sauront-ils trouver et mettre hors d’état de nuire la Veuve blanche ?

Comme on s’y attend, dépaysement, action et suspens forment la trame de ce roman qui offre une vision impressionnante de l’envers du décor de la DGSE, à la fois effrayant et excitant.

L’Espion français de Cédric Bannel, Editions Robert Laffont, collection La Bête Noire, juillet 2021, 528 pages.

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